De l’invocation de l’intérêt général à l’expression des craintes des salariéEs, la vocation à protéger de l’association Les Landes se poursuit dans un dédale de recours administratifs et juridiques.
Par le conseil d’administration pour l’association des Landes.
Voici comment nous – c’est-à-dire le nouveau bureau de l’association – apprenons que nous ne pourrons pas nous opposer juridiquement à la reprise en régie directe :
Tout d’abord, une lettre est adressée à toutEs les conseillers et conseillères communautaires avant la réunion du Conseil du 29 juin 2023. Ce courrier exprime l’opposition de l’association au projet qui va leur être soumis ainsi que la disponibilité de ses membres pour trouver une solution à cette situation. Malheureusement, la reprise en régie directe est validée lors de cette réunion.
Après la réception par exploit d’huissier de la décision d’OBC, une réponse est adressée dans laquelle le bureau exprime à nouveau son opposition à la reprise en régie directe, notre souhait de connaître les raisons d’intérêt général qui la motivent et notre ouverture pour trouver d’autres voies.
Une rencontre a lieu le 5 juillet entre deux membres du bureau et des représentants d’OBC. Durant ce rendez-vous, il est évoqué le fait que nous ne nous opposons pas à des rencontres entre l’EPCI et les salariéEs, mais que nous souhaitons en être informés en amont.
À l’inverse, le délai que nous avions sollicité pour gérer la transition au cas où celle-ci ne pouvait être évitée est refusé. Pourtant nous savons que six mois est une durée trop courte pour faire les choses aussi correctement que possible.
En parallèle, nous recherchons un conseil juridique pour identifier les voies et moyens pour nous opposer à la décision de reprise en régie directe.
Notre avocate, ayant étudié la situation, nous informe du fait que la jurisprudence est malheureusement claire : l’invocation de l’intérêt général pour légitimer la décision (même s’il n’est pas explicité comme c’est le cas ici) suffit au juge pour renvoyer notre recours.
Nous envisageons alors de faire un recours gracieux auprès de la collectivité mais il n’est pas envisageable dans notre cas. Seul un recours contentieux (auprès du tribunal administratif) peut s’ouvrir à nous avec les mêmes perspectives dans un délai de recours très court.
Nous ne pouvons pas espérer un résultat favorable à ce niveau. Cependant, notre conseil nous indique que nous pourrions engager une action pour réclamer la compensation de notre préjudice (entre-autre réputationnel), dans un délai de 4 ans à compter de la mise en œuvre de la décision. Ce qui serait l’occasion de discuter les motivations et la légitimité des arguments d’OBC dans son invocation de l’intérêt général.
Le parcours d’une transition pas facile
Comme nous l’avions anticipé, la période estivale retarde le traitement des dossiers. Pour nous renvoyer la responsabilité des lenteurs administratives, nous recevons le 18 septembre 2023, un courrier du président d’OBC : celui-ci nous accuse d’empêcher les contacts entre l’EPCI et les salariéEs.
Le 25 septembre 2023, une réunion du conseil d’administration a lieu en présence du vice-président de l’EPCI. Nous voulons connaître le projet pour le futur de l’activité et des missions des membres de l’équipe, mais cette rencontre ne nous permet pas d’obtenir une réponse. Par ailleurs, lors de ce CA sont prises deux décisions relatives aux personnels :
- Des augmentations de salaires sont décidées pour une partie du personnel. Elles se situent en conformité avec la convention collective dans la poursuite de rattrapages qui avaient décidé l’année précédente par le précédent bureau pour une autre partie du personnel. (Cet enjeu avait été exprimé publiquement lors de l’AG de l’association).
- Un mandat est donné à une juriste spécialisée pour accompagner le personnel dans ses relations avec OBC. L’objectif est d’éclairer le choix des salariéEs face aux propositions de reprises de leurs contrats par la collectivité.
Le 30 septembre 2023, nous demandons à l’avocate de l’association d’adresser un courrier à l’EPCI dans lequel il est précisé que :
« Si [l’association] n’entend pas s’opposer à la décision de résiliation, pour regrettable qu’elle soit, elle entend en revanche observer la plus grande vigilance quant aux conditions dans lesquelles s’effectuera cette reprise, tant en ce qui concerne le transfert du personnel qu’en ce qui concerne la dévolution des biens.
En cas de traitement inéquitable de la situation, l’exercice d’un recours indemnitaire reste donc une option envisageable pour l’association, étant précisé qu’outre la préservation des droits, un tel recours permettrait de discuter du motif d’intérêt général – brutalement – avancé.
Enfin, par courrier du 18 septembre dernier, vous pointez l’impossibilité de pouvoir échanger avec les salariés de l’association en vue de leur prochaine intégration à OBC. Or, si l’adhésion de ces derniers à la démarche initiée peut poser difficulté, elle n’est aucunement due à d’éventuels blocages dont l’association serait à l’origine.
Au contraire, l’association se tient à votre entière disposition pour poursuivre les échanges en lien avec l’avenir du site, incluant les actions à mener pour en assurer sa protection, ainsi qu’avec la préservation de l’équipe professionnelle ».
Le 9 octobre 2023, une réunion est organisée entre OBC et les représentants de l’association. D’abord prévue pour ne concerner que les « éluEs » des deux entités, elle associe également les directions de l’EPCI.
Nous prenons la décision d’y associer le directeur et la représentante du personnel ainsi que Maître Tréheux, notre avocate. Sa présence est récusée par le président d’OBC qui nous a déjà accusé de judiciariser les démarches.
Le 17 octobre 2023, Maître Julie Cohadon, avocate mandatée pour accompagner les salariéEs rencontre l’équipe pour présenter les enjeux de la procédure en cours. Puis, elle transmet à l’EPCI différentes questions concernant des points litigieux sur les propositions de contrats : calcul du salaire futur sur la base du revenu net et non brut et absence de précision concernant les missions futures et l’organisation du temps de travail des salariéEs.
La demande de compensation
Le 17 novembre 2023 et les jours suivants, une partie du conseil d’administration, accompagnée par des membres de l’équipe salariée procède à un inventaire détaillé de tous les biens de l’association.
Il s’agit de faire une estimation de la valeur du patrimoine matériel de l’association sur la base de laquelle nous demandons à notre avocate de transmettre une demande de compensation s’il y a reprise par OBC.
Nous avons bien sûr identifié et exclu les biens mis à disposition par l’EPCI à l’origine. Egalement les matériels qui nous étaient indiqués par le directeur (suite à ses échanges avec les services) comme n’intéressant pas OBC, notamment les véhicules et les ordinateurs.
Il est utile de préciser que nous sommes soumis à la pression de l’EPCI sans pour autant connaître le détail de ses stratégies.
Comme nous souhaitons éviter des tensions supplémentaires qui affecteraient le personnel, déjà très touché par la situation et ses incertitudes, nous choisissons de confier à notre avocate une mission de négociation avec l’avocate de la partie adverse.
L’enjeu pour nous est alors de faire respecter les intérêts de l’association. Cela passe, entre autres, par l’apurement des subventions dues, la compensation des indemnités de rupture des contrats de services divers (téléphonie…) que nous avons dû assumer en conséquence d’une décision qui ne relevait pas de notre fait; celle du temps de travail réalisé par nos salariéEs au profit d’OBC pour la commercialisation de la saison 2024 et la transition; ou encore par la négociation du rachat du patrimoine matériel de l’association…
Le refus des salariés des contrats d’OBC
Le 28 novembre 2023, une assemblée générale ordinaire est convoquée extraordinairement pour informer les adhérentEs de ce qui a été mis en œuvre et de la situation en cours.
Nous avons évidemment conscience que la discrétion nécessaire à la négociation et au maintien de la sérénité des équipes peut donner l’impression d’une inaction, voire d’une dissimulation. Il est donc important d’apporter des réponses aux questions qui se multiplient.
C’est à cette occasion que nous apprenons, comme tout le monde, que la quasi-totalité de l’équipe salariée refuse les contrats proposés par OBC. L’équipe donne alors lecture d’une lettre ouverte expliquant les raisons de ces décisions.
La veille, Mathias Hocquart, nouveau directeur, nous a aussi informé de sa décision de ne pas accepter la poursuite de sa mission sous l’égide d’OBC.
La remise des clés
Le 3 janvier 2024, nous rendons les clefs du centre aux huissières venues faire un état des lieux. Étonnamment, celles-ci ne semblent avoir aucune connaissance du contexte. D’un point de vue pratique, elles ne savaient pas non plus qu’il y avait plusieurs sites à inventorier (le centre les Landes mais aussi le site des menhirs). Cette opération peu agréable mobilise plusieurs membres du CA pendant une demi-journée. Mais aucun représentant de l’EPCI ne prend le temps d’y participer.
Hormis ceux dont nous avons appris par notre directeur que les services de l’EPCI ne voulait pas les récupérer (ordinateurs et véhicules), nous laissons sur place l’ensemble des matériels en faisant remarquer qu’ils restent la propriété de l’association.
Nous emportons donc, de bonne foi et sans intention de nous les accaparer personnellement, les ordinateurs et les deux véhicules qui ne sont pas utilisés depuis. Leur assurance ne couvre d’ailleurs que les membres de l’association et son personnel.
Par ailleurs, certains matériels (serveurs etc.), liés aux contrats passés avec des opérateurs extérieurs et rompus moyennant pénalités par le fait de la décision de l’EPCI, sont restitués comme nous en avions l’obligation.
Enfin, nous emmenons évidemment l’ensemble des archives et documents administratifs ou comptables pour poursuivre la gestion de l’association.
Nous apprendrons par la suite et par voie de presse que nous sommes publiquement accusés d’avoir volé les voitures, emporté des matériels etc.
Des erreurs portant préjudice
A partir du 22 décembre 2023, comme la quasi-totalité de l’équipe salariée a décidé de refuser les contrats proposés par OBC, les personnels ont été licenciés et les membres du conseil d’administration se retrouvent seuls pour assurer le suivi administratif de l’association. Cela signifie mettre à jour la comptabilité, payer les factures en instance, préparer le bilan. Il faut aussi solder tous les contrats en faisant face à leurs différentes obligations, même si nous ne sommes pas à l’origine de ces ruptures.
Parallèlement, nous travaillons sur la réforme des statuts de l’association de manière à prendre en compte l’évolution de sa mission et de ses relations avec la collectivité.
Le 15 février 2024, nouvelle surprise : nous apprenons qu’une partie des documents des procédures de licenciement fournis aux salariéEs présentent des erreurs portant préjudice aux personnes dans le cadre de leurs démarches administratives. Les échanges des salariéEs avec les services d’OBC deviennent de plus en plus difficiles.
À leur demande, nous mandatons à nouveau Me Cohadon pour les accompagner collectivement.
Puis nous apprenons que nous sommes accusés d’avoir dissimulé le fait qu’une employée était déléguée du personnel, ce qui induirait un vice de procédure dans son licenciement. Enquête faite, nous pouvons prouver que toutes les réunions de CA qui se passaient en présence du Vice-Président de l’EPCI incluaient la déléguée es qualité. De plus, dans l’enregistrement de la séance du conseil communautaire ayant décidé la reprise en régie directe, nous découvrons que le président et le directeur général de services étaient bien informés à ce propos.
Le 7 mars 2024, nous convions les adhérentEs à une assemblée générale extraordinaire pour leur proposer la réforme statutaire que nous avons travaillée. C’est également l’occasion de faire un point d’étape sur la situation.
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