A vos bio-seaux citoyens !

Stocker du carbone et de l’eau dans les sols tout en réduisant nos émissions de CO2, c’est à portée de fourche. Lorsque la science, les acteurs de la transition écologique et les institutions  travaillent main dans la main, les solutions deviennent accessibles à tous. Je vous partage la compilation des informations nécessaires pour comprendre et agir pour la préservation des sols avec le cycle des végétaux.

La gestion des déchets représente aujourd’hui 3% des gaz à effets de serre (collecte, incinération…). A l’heure actuelle, un tiers de nos ordures ménagères est composé de déchets que l’on peut composter soi-même. Appelés biodéchets, ces restes de cuisine et de table ou déchets de jardin peuvent retourner localement au sol sans nuisance. Cette démarche de gestion locale permet de réduire l’impact environnemental, redonner vie à nos sols et engager tous et toutes dans le nouveau tri de ces déchets qui deviendra impératif sur l’ensemble du territoire français au 1er janvier 2024.

Le Réseau Compost Citoyen est porté depuis sa création en 2009 par des acteurs présents sur l’ensemble du territoire français, métropolitain et ultra-marin. Réunis pour le développement de la prévention et gestion de proximité des biodéchets, les adhérents sont majoritairement de simples citoyens (~45%), mais aussi des professionnels du compostage (~30%) et des collectivités territoriales (~25%). Réduire et composter les biodéchets des ménages et des professionnels requiert des compétences spécifiques. C’est pourquoi le Réseau Compost Citoyen et l’agence nationale du développement durable (ADEME) ont développé des formations liées à ces thématiques. Plus de 50 organismes de formations homologués sont maintenant présents en France. Cette année le RCC a organisé son séminaire à Saint-Malo, et pour cette occasion, M. Sylvain Pellerin chercheur à l’institut national de recherche publique qui étudie les interactions entre l’agriculture, l’alimentation et l’environnement, ainsi que leurs impacts sur la santé et le développement ( INRAE ), est venu présenter une conférence intitulée :

Le carbone organique du sol et la lutte contre le changement climatique : quelle contribution du compostage ?

Alors que les températures mondiales et les émissions de gaz à effet de serre battent des records, les émissions prévues pour 2030 doivent diminuer de 28 à 42 % pour parvenir à limiter le réchauffement à 2°C et 1,5°C respectivement. Pouvoir atteindre une augmentation limitée des températures ( comme convenu dans l’Accord de Paris ) repose sur un renforcement significatif des mesures d’atténuation ( réduction des énergies fossiles et un renforcement des puits de carbone tel que les prairies permanentes, haies, forêts) au cours de cette décennie afin de réduire l’écart entre les niveaux d’émissions prévus et les niveaux à atteindre.

L’initiative internationale « 4 pour 1000 », lancée par la France le 1er décembre 2015 lors de la COP 21, vise à montrer que l’agriculture, et en particulier les sols agricoles, peuvent jouer un rôle crucial en matière de sécurité alimentaire et de changement climatique. Elle consiste à fédérer tous les acteurs volontaires du public et du privé (États, collectivités, entreprises, organisations professionnelles, ONG, établissements de la recherche…) dans le cadre du Plan d’action climat-Paris. Appuyée sur une documentation scientifique solide, elle invite tous les partenaires à faire connaître/et à mettre en place des actions concrètes pour le stockage du carbone dans les sols.

On le sait, les activités humaines émettent d’énormes quantités de gaz carbonique (CO2) dans l’atmosphère, ce qui renforce l’effet de serre et accélère le changement climatique. Mais ce que l’on sait moins, c’est que chaque année, 30% environ de ce gaz carbonique est récupéré par les plantes grâce à la photosynthèse. Ensuite, lorsque les plantes meurent et se décomposent, les organismes vivants du sol, tels que les bactéries, champignons ou vers de terre, les transforment en matière organique. Grâce aux plantes et aux organismes vivants, les sols contiennent deux à trois fois plus de carbone que l’atmosphère. Riche en carbone, la matière organique des sols est essentielle : elle retient l’eau, l’azote et le phosphore, indispensables à l’agriculture. Mais l’alternance de phases de dessèchements et de précipitations intenses renforcent les phénomènes érosifs. À terme, près de 30 millions d’hectares de terres arables pourraient être perdus chaque décennie. La dégradation des sols menace 40% des terres.

Si le niveau de carbone stocké par les sols dans les 30 à 40 premiers centimètres du sol augmentait de 0,4% (soit 4‰) par an, l’augmentation annuelle de dioxyde de carbone (CO2) dans l’atmosphère serait considérablement réduite. Ce taux de croissance de 4‰ par an des stocks de carbone du sol n’est pas une cible normative pour chaque pays, mais une orientation à suivre.

La matière organique participe à cette lutte grâce notamment aux sols agricoles et forestiers, l’augmentation de la quantité de carbone dans les sols agricoles et forestiers contribue à :

  • stabiliser le climat (atténuation des quantités de CO² dans l’atmosphère)
  • s’adapter aux changements climatiques en cours
  • assurer la sécurité alimentaire globale c’est-à-dire fournir de la nourriture en quantité suffisante et de qualité.

75% des sols sont déjà dégradés à différents degrés sous l’effet de l’activité humaine et les dérèglements climatiques accélèrent ce processus. La dégradation des sols a des effets néfastes sur la sécurité alimentaire et l’agriculture familiale. Notre capacité à nourrir 9,8 milliards d’humains en 2050 dans un contexte de changement climatique dépendra notamment de notre capacité à garder les sols vivants.

Les moyens : 5 pratiques à développer pour la gestion des sols et l’agroécologie

  • Éviter de laisser le sol à nu pour limiter les pertes de carbone
  • Restaurer les cultures, les pâturages et les forêts dégradées
  • Planter arbres et légumineuses qui fixent l’azote atmosphérique dans le sol
  • Nourrir le sol de fumiers et de composts
  • Collecter l’eau au pied des plantes

Appliquée à la surface des sols mondiaux, soit à un stock d’environ 860 milliards de tonnes de carbone, la cible 4‰ se traduirait par un stockage annuel de 3,4 milliards de tonnes de carbone dans le sol qui contrebalancerait l’augmentation du CO2 atmosphérique. Cette mesure serait étendue, au-delà des sols agricoles, tel que les forêts et en milieu urbain. 570 millions de fermes dans le monde et plus de 3 milliards de personnes en zones rurales pourraient mettre en place ces pratiques, dans la limite des capacités de vos sols. Ceci n’est en aucun cas une mesure compensatoire, il s’agirait de ne pas réitérer l’arnaque financière des crédits carbone ou de dédouaner l’utilisation de pesticide, mais de rétablir le cycle naturel du carbone par des pratiques que chacun peut s’approprier, mettant le technosolutionnisme au rang de gadgets.

Et le compostage dans tout ça… Le compost, une des réponses à l’initiative 4/1000.

Qu’il soit individuel ou partagé, cette pratique nécessite de respecter quelques règles pour éviter les nuisances, tout est une affaire d’équilibre. Dans la cuisine, avant de mettre vos biodéchets dans le bio-seau, veillez à fragmenter en tronçons, en quartiers…, assurez-vous d’avoir retiré les étiquettes, qu’il n’y ait ni plastique ni métal, ( par exemple les lingettes sont synthétiques même si la mention biodégradable est inscrite sur l’emballage, elles contiennent aussi des molécules nocives pour votre santé et l’environnement, les boites de camembert sont fixées par des agrafes et l’étiquette est en papier plastifié donc à mettre au tri sélectif ), et pas de médicaments ( si périmés les déposer  à la pharmacie ), afin d’être sur que votre compost ne soit pas source de pollution.

Au jardin, les végétaux durs, longs et encombrants sont plus difficiles à composter. En sectionnant, fragmentant, écrasant ou broyant ces déchets, vous facilitez l’action des micro-organismes. Ces déchets favorisent l’aération des matières en compostage.

Mélangez des déchets carbonés, du jardin, durs et secs (branches broyées, feuilles mortes, paille…) avec les déchets azotés, de la cuisine, mous et humides (épluchures, restes de repas, marc de café…). Au fur et à mesure des apports, recouvrez la matière azotée avec la matière carbonée, ceci évitera l’installation de moucherons.

Pour la tonte, utilisez la pour pailler vos plates bandes, ceci évitera le désherbage, gardera votre sol à l’abri du soleil et de la pluie et sera un apport en azote pour vos cultures.

Les micro-organismes utiles au compostage ont besoin d’oxygène. Sans air, ils sont remplacés par d’autres qui produisent des gaz malodorants et du méthane, puissant gaz à effet de serre. Réalisez un brassage hebdomadaire, ceci évitera aussi, la venue de rongeurs.

Pas assez d’humidité, les déchets deviennent secs, les micro-organismes meurent et le processus s’arrête. Il faut alors arroser le compost.

Bien surveiller son compost, par exemple au moment de l’apport de déchets frais, permet de déceler un excès ou un déficit d’humidité, des zones mal décomposées, des odeurs… À partir de là, les interventions sont faciles et prennent en général peu de temps.

Par ces gestes simples, vous réduisez le coût et l’empreinte carbone des ordures ménagères. Sans besoin d’énergie pour le transport et gratuitement, les organismes vivants transforment et stabilisent le carbone organique (humification) en un amendement bon pour les sols, tout en restituant des nutriments et minéraux indispensables à la croissance des plantes, et la boucle est bouclée.

A la ville comme à la campagne, avec cette pratique, et en végétalisant, vous devenez  un acteur de : l’initiative quatre pour mille.

Sylvain

Sources :

http://www.eisenia.coop/actualites/compostage-a-l-inra/

https://grandouest.reseaucompost.org/

https://agirpourlatransition.ademe.fr/particuliers/maison/dechets/5-regles-reussir-compost

https://reporterre.net/Le-compost-devient-obligatoire-mais-personne-n-est-pret

https://reporterre.net/Composte-ou-brule-Tout-le-monde-s-arrache-le-broyat

https://www.60millions-mag.com/2021/12/23/les-lingettes-nettoyantes-un-veritable-desastre-19491

https://www.inrae.fr/sites/default/files/pdf/4pM-Synthèse-Novembre2020.pdf ( Rapport )

https://www.inrae.fr/actualites/sols-securite-alimentaire-climat

https://4p1000.org/

https://www.unep.org/fr/actualites-et-recits/communique-de-presse/les-pays-doivent-aller-plus-loin-que-les-engagements-pris

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